Le 10 octobre dernier, j’ai livré une performance au Balattou, dans le cadre du mois du créole. Une soirée bien arrosée par sa présence exclusivement féminine où Mafane, de par sa douce voix, nous contait des histoires de son créole natal, un créole qui baigne dans l’océan indien; le créole réunionnais ; où Turenne a dansé sur des notes de Beethova Obas, question de nous emporter dans des mouvements de danse folklorique haïtienne et contemporaine d’une grâce inégalée; où Maguy Métellus nous a agréablement débouché les oreilles avec des textes hautement sensuels et d’une explicité assumée et décongestionné les esprits de par sa voix ô combien suave; où la lionne de la poésie de la relève montréalaise Bérékyah, nous a conté l’amour dans ses aspects lumineux et sombres; où Miss Lady Blu, d’une verve déchaînée, nous racontaitdes souvenirs des années 90 à nous faire cramper de rire et elle était accompagnée d’une jolie demoiselle à la coiffure et la voix électrisantes; où Shirly Delva, designer de Ethika Accessoires, qui est une ligne d’accessoires conçue à partir de vêtements, retailles, bouts et coupons de tissus recyclés, a fait défiler ses sacs à mains tandis que Manmzel Yémaya, de par sa voix enchanteresse, a poétiquement décrit les dits-sac-à-mains; où la présidente du Kepkaa Arcelle Appolon, de par son texte sur les émotions masculines, nous a conscientisées, les femmes, sur comment ne pas banaliser les émotions des hommes question d’apprendre à les comprendre davantage. L’auteure d’origine haïtienne du livre pour enfants Les aventures de Nanou et Ti Ko/ Aventi Nanou ak Ti Ko, nous a démontré pour une deuxième année consécutive, la constante évolution de son style littéraire caramélocréolisé ainsi que la maturité de sa plume. La soirée a été animée par la talentueuse illustratrice Lady Special K.

Accompagnée au piano parIshmaël Mevs (l’un des membres fondateurs du groupe Melodi Muzik) j’ai proposé un nouvel hymne national haïtien à mon audience en interprétant la chanson « Ayiti se » de Mika Ben. Pas que j’insulte la Dessalinienne; qu’on me brûle vive! Ayiti se Liberté, Égalité, Fraternité, Beauté, Dignité, Identité, Personnalité, Intégrité…  C’est une proposition!

Pendant la pause, un beau brun s’approcha de moi et me souffla : « Mwen renmen travay ou a » et me félicita de mon interprétation. J’étais prise au dépourvue, de par mon tempérament de groupie puisque c’était Paul Beaubrun (son nom de famille est tout à son honneur) du groupe Zing Expérience et fils de L et Manzè de Boukman Eksperyans qui m’a saluée! Such a sweet heart this guy! Il m’a offert un verre de grenadine et m’a invitée à son show, le 16 octobre à la même place…

Paul et son frère T-Doz, ainsi que des musiciens hors-pairs de la scène montréalaise et internationale (pour en citer que quelques-uns : Aldo Guizmo, Wesli Louissaint, Ronald du groupe Rara Soley, Manmzel Yémaya…) ont éclaté le Balattou! Leurs sons avant-gardistes pop-rock en fusion avec la musique traditionnelle haïtienne, le rasin, nous a envoûtés et je peux en témoigner de comment j’ai brassé, brassé, brassé-brassé mes reins! Leurs textes sont des paroles d’amour universel, de solidarité, le tout mêlé à une pointe de vigilance azorienne; l’audience était simplement emballée et en redemandait encore et encore! Parlant d’Azor, ils m’ont rendu presque hystérique lorsqu’ils ont chanté des soubresauts de  Zanmi  :

« Sanmba pou sanmba ou poko sanmba

Wap mache di ou se sanmba wo…

Kilè wap pran konsyans

Mè kilè wap pran konsyans

Sanmba pa lo bannann

Sanmba pa lo patat

Sanmba pa vann nan mache

Fò’w gen don sanmba pou’w sanmba wo… »

Pour conclure, ces jeunes hommes ont été à la bonne école, ils sont super terre-à-terre, ce sont désormais mes frères, la vie est belle et je lui dis merci, vive le mois du créole et ses festivités.

Ayibobo.

Jennifer Sidney

 

Jennifer Sidney est une artiste animée par la passion, qui a plus d’un tour dans son sac (écrivain, mannequin, conteuse, actrice, comédienne, chanteuse, scénariste…)

Principalement, elle est écrivain; par le simple fait d’écrire et surtout, selon un artiste total, capital, global, le grand Frankétienne:

“Un écrivain, c’est quelqu’un qui établit un compromis, parfois à son insu, entre l’esthétique et l’éthique, l’idéologie et la politique, entre le social, le réel et ses propres pulsions personnelles.’’