Mea culpa d’une blogueuse pendant le Temps des Fêtes: Pardonnez-moi ma négligeance, vous ô assidus lecteurs! J’étais occupée à prendre quelques livres… Je reviens en 2014, avec fermeté et plus de voyages à l’intérieur de cette magnifique île qu’est Montréal.

Tout d’abord, si je vous dit 1534, Jacques Cartier, croix plantée sur terre micmac, troc de fourrures et d’alcool, colonisation, automatiquement, il y a le Canada qui vous vient en tête n’est-ce pas? Malgré que ça emmène une légère contradiction avec le titre, puisque le Canada n’est pas une île. De par sa variété naturelle, c’est-à-dire qu’on y retrouve un désert, des multiples types de végétations, des territoires glaciales, un volcan enfoui (espérons-le, à jamais), et qu’on puisse vivre les quatres saisons, fait tout de même de ce territoire un rêve (quoique heureusement, nous avons pas tous les mêmes rêves) mais non, je ne fais pas référence au Canada. Là, si je vous dit, révolte des esclaves africains, 1804, Jean-Jacques Dessalines, indépendance, fausse liberté (étrangement, mes doigts ont éternué le mot fausse: une réflexion serait de mise…) vous me répondriez Haïti et vous n’auriez pas tort parce que ce sont des mots clés qui sont propres à son histoire et que Haïti est belle et bien une île… Cependant, le surnom qu’on lui a attribué c’est la Perle des Antilles et non pas l’île de Rêve… Ha-Ah! Bon d’accord, je cesse ce semblant de charade…

Le 21 décembre dernier, au restaurant africain le Khaïma, a eu lieu une célébration en l’honneur de la mémoire des vaillants ancêtres de l’Île de Rêve: l’Île de la Réunion. Les musiciens réunionnais du groupe Mayé nous ont rassemblés à la fèt kaf afin de danser sous les sons de maloya et partager avec nous, des paroles de justice et de fraternité. Pour suivre les jeunes de la relève réunionnaise dans leurs initiatives,je vous invite à visiter le site www.reunion-quebec.com. Il y avait également d’autres musiciens, leurs cousins créoles de l’Île Maurice, qui ont enchantés l’auditoire avec des chants et des rythmes de séga. Ô chers aventuriers, mettons le cap vers une île où le créole baigne dans l’océan indien. La fèt kaf a piqué ma curiosité et m’a emmené à faire une recherche sur l’abolition de l’esclavage à l’Île de la Réunion, appelé aussi l’Île de Rêve. Bonne découverte!

Les premiers habitants de l’Île Bourbon (ancien nom de l’Île) étaient quelques Européens et des Malgaches. En 1665, il y avait à peu près une trentaine de personnes et en 1704, il y a eu une forte croissance démographique sur l’île augmentant la population à pas moins de 730 personnes. Les mères étant essentiellement des Malgaches, la population fût largement métissée de par leurs rapports avec les premiers colons, ce qui a, par ailleurs, démarré l’esclavage. À partir de 1725, la traite des esclaves est autorisée sur l’île, donc les dits-esclaves, tous d’origine africaine, vont croître jusqu’à 45 000 contre à peu près 26 000 habitants libres blancs, noirs ou métisses. Parlant de métisses, plus tard dans leur histoire, après l’abolition de l’esclavage, question d’obvier un manque de main d’oeuvre bon marché (qu’ils appellent) va débuter l’engagisme. À priori, les engagés devaient immigrer sur l’île pour une courte durée et pourtant, on parle de 46 000 engagés qui vont rester sur l’île: des Indiens du Sud de l’Inde qui vont former la communauté des Malbars, des Indiens du Nord de l’Inde qui forment la communauté des Zarabes ainsi que les Chinois. Dès lors, des mariages mixtes vont se faire, ce qui crée par ailleurs, la beauté de l’Île de Rêve. Pour revenir à leur Histoire, la Révolution française abolit l’esclavage en 1794, cependant, les colons de l’Île Bourbon déclinent carrément la validation de cette décision qui les ruinerait, et renvoient les commissaires de la République venus faire appliquer la loi. En 1802, le rétablissement de l’esclavage destiné à relancer l’économie des colonies est fortement bien accueilli. L’Angleterre met fin à l’esclavage dans ses colonies en 1834 donc les îles voisines, Maurice et Seychelles sont libres. Il faudra près de 15 ans, aux esclaves de la Réunion, afin de respirer la liberté. L’année 1848 est une année de grands changements.

Février: Révolution. Le gouvernement de Louis-Phillipe est renversé.

27 avril: Décret mettant fin à l’esclavage, s’accompagnant de treize autres décrets, destinés à prévenir certaines difficultés que pourrait entraîner l’émancipation des esclaves…

Mai: La nouvelle du renversement du gouvernement arrive à la Réunion (à croire que l’internet aurait bien servi à cette époque parce que si vous faites bien le calcul, ça leur a pris 3 mois avant de recevoir une nouvelle! C’était l’époque des bateaux et gmail, ils ne connaissaient pas…)

8 juin: Le navire Calcutta arrive de Bordeaux, pour apporter la confirmation officielle du changement de régime.

9 juin: La République est proclamée.

10 juin: Les décrets du gouvernement provisoire sont enregistrés par la cour d’appel. Circule sur l’île une dépêche qui anime la crainte des colons: l’esclavage a bel et bien été aboli et les colons estiment qu’aucune mesure efficace n’a été mise en place afin de préserver l’économie locale.

17 juillet: Rassemblement des colons.

18 juillet: Un comité provisoire de 15 membres est élu. Un vent d’agitation souffle parmi les colons. Le gouverneur Graeb se contente d’un rôle d’observateur puisqu’il sait que ses jours dans la colonie sont comptés. Il sera remplacé par un commissaire de la République.

13 octobre: Arrivée sur l’île de Joseph Napoléon Sébastien Sarda-Garriga, commissaire général de la République, chargé de proclamer l’émancipation des esclaves de la Réunion.

19 octobre: le commissaire Sarda-Garriga fait enregistrer la proclamation du décret d’abolition de l’esclavage, par la cour d’appel.

24 octobre: Nouveau décret qui organise le travail pour les nouveaux affranchis. Les personnes non libres sont obligées de contracter un engagement de travail avant le 20 décembre 1848. Les propriétaires approuvent, mais Sarda-Garriga doit se défendre de vouloir, par le biais du travail obligatoire, maintenir une sorte d’esclavage.

20 DÉCEMBRE 1848: Sarda-Garriga, au matin du 20 décembre, affiche la proclamation et 62 000 esclaves deviennent libres. Les esclaves, pour fêter leur émancipation, n’ont pris qu’un jour de liberté et ils ont enlevé au marché, le poteau où ils se faisaient fouetter, fouetter, fouetter, par les grands macaques de l’Europe.

Vive la fèt kaf! Nous souhaitons prospérité aux jeunes réunionnais de la relève, qui nous apportent les messages des ancêtres par l’entremise du maloya et lors de leur prochaine célébration, je ne manquerai pas de vous en faire part; #yougottabethere #itsamust c’est à ne pas manquer!

Tourlou,

Jennifer S.

“Nous ne sommes pas encore libres. Nous avons seulement atteint la liberté d’être libres.” -Madiba

Notice bibliographique: http://www.mi-aime-a-ou.com/histoire_abolition.php.